Une de mes idées les plus folles aurait été que Microsoft n'empêche Firefox de fonctionner correctement sur Windows Vista. Eh bien, voilà déjà un pas dans ce sens. Oh, aller plus vite aurait peut-être fait réagir du monde, et on aurait pu leur coller un procès pour atteinte à la libre concurrence. Ici, fort heureusement, le logiciel libre ne semble pas concerné.

Toutefois, il ne faut pas perdre de vue ceci : Microsoft fait ici une démonstration de son pouvoir d'éditeur, qui est d'interdire ou d'autoriser certains programmes sur la machine cliente. On nous explique que c'est une bonne choise pour accroître la stabilité de l'OS, etc etc. Et puis, on pourra ensuite passer à une certification obligatoire pour tous les pilotes, pour les mêmes raisons. Et peut-être un jour pour toutes les applications ?

Vous souvenez-vous de Palladium/NGSCB ? De la menace qu'il faisait planer de contrôler les applications autorisées et interdites sur une machine ? Amis lecteurs, Microsoft vous montre ici qu'il peut, progressivement, doucement, rendre sa certification, éventuellement payante, obligatoire pour tous les logiciels sous le système d'exploitation Windows. Et c'est le cas de tout système fermé. Il est temps de passer à un OS libre.

Si la concurrence en informatique était saine, j'utiliserai Linux sans nécessairement faire de la propagande autour de moi. Malheureusement, ce n'est pas le cas. Celui qui domine le système d'exploitation domine Internet, et les applications. Si ceux qui ont Linux se taisent, si chacun reste sous Windows, Microsoft pourra asseoir son monopole en continuant de rendre la migration de Windows à Linux difficile (par des formats fermés...). Il pourra rendre le web propriétaire, en imposant son navigateur et donc ses technologies. Il pourra imposer des protocoles fermés pour le matériel, et faire disparaître le matériel classique, utilisé uniquement par des linuxiens, et pas assez rentable. Nos amies les maisons de disque pourront faire passer des lois diverses pour rendre le logiciel libre illégal à cause du risque qu'il présente de permettre le piratage. Ils pourront rendre obligatoire la surveillance et le contrôle du cyberespace pour se prémunir du risque de perdre leur suprématie. D'une démocratie dans le monde réel, nous laissons la porte ouverte pour la construction d'une dictature du cyberespace, sans doute appelé à devenir indispensable au monde dans les prochaines décennies.

Et où cela nous mènerait-il ? À deux informatiques. L'une majoritaire, contrôlée, fermée, dominée par un monopole. L'autre minoritaire, illégale, ouverte selon les principes de l'open-source, et en manque de matériel. La culture, tout serait incompatible entre l'une et l'autre. Nous obtenons deux communautés hostiles, mais l'une est si peu nombreuse qu'elle doit vivre cachée. Et si une répression commence, fuir...

Je ne pensais pas aller aussi loin, et on m'affirmera sans doute que c'est là prêter des intentions bien diaboliques à Microsoft pour si peu de chose, mais beaucoup d'actions de grands groupes vont dans ce sens actuellement, et il n'est jamais prudent de laisser à quelqu'un des pouvoirs sur la simple idée qu'il n'aura pas l'intention de s'en servir. En tout cas, la mini-dystopie que je viens de pondre correspond exactement à mon projet de roman... mais je vous en dirai plus dans un autre billet, quand j'aurai quelque chose de consistant à vous montrer. Patience...